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Barrière coulombienne

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En physique nucléaire, la barrière coulombienne entre deux noyaux atomiques en interaction résulte de la compétition entre deux forces : la force de répulsion électrostatique entre les protons (selon la loi de Coulomb), qui est à longue portée (théoriquement jusqu'à l'infini), et la force nucléaire entre les nucléons (neutrons et protons), qui est fortement attractive mais à courte portée (de l'ordre du femtomètre). Cette barrière détermine les propriétés des processus de fusion et de fission des noyaux atomiques.

Cette notion a pris forme dans les années 1930, avec les travaux de George Gamow sur la radioactivité alpha, puis avec les découvertes expérimentales de la fission spontanée et de la fission induite des noyaux atomiques[1].

Interaction entre deux noyaux atomiques

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Quand deux noyaux atomiques se rapprochent, leur énergie potentielle d’interaction augmente avec la répulsion coulombienne, puis passe par un maximum lorsque la force nucléaire attractive commence à agir[2]. La hauteur du maximum et sa position déterminent la barrière coulombienne entre les deux noyaux. Cette barrière est dissymétrique, on distingue donc :

  • la barrière de fusion : lorsque deux noyaux se rapprochent pour fusionner, la hauteur de la barrière est leur énergie potentielle maximale, mesurée à partir de leur position initiale (supposée à l’infini) ;
  • la barrière de fission : lorsqu’un noyau fissionne en deux noyaux fils, la hauteur de la barrière se mesure par rapport à l’énergie potentielle du noyau initial dans son état fondamental. Ce processus vaut aussi bien pour la fission des noyaux très lourds, que pour la radioactivité alpha, qui correspond à une fission dont un des noyaux fils est un noyau d’He4.
Illustration de la barrière coulombienne entre deux noyaux dans les processus de fusion et de fission nucléaires.

En première approximation, la forme et la position des deux barrières sont identiques ; les calculs plus précis prennent en compte les déformations des noyaux qui peuvent être différentes lors des processus de fission ou de fusion, et des effets de couches quantiques.

Calcul des barrières coulombiennes

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Une théorie qui calculerait les barrières coulombiennes à partir de l’interaction élémentaire nucléon-nucléon est hors de portée théorique et pratique (voir Structure nucléaire). Les modèles les plus utilisés sont des modèles macroscopiques qui permettent d'évaluer l'énergie des noyaux quelles que soient leurs déformations[3], notamment le modèle de la goutte liquide nucléaire[4]. Les calculs sont effectués avec des hypothèses simplificatrices, que l’on valide de manière empirique par comparaison avec les données expérimentales : hypothèse adiabatique (l’énergie est minimale à chaque étape), paramètres du modèle de la goutte liquide, choix des paramètres pour la séquence de formes[5].

Barrière de fission

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Pour déterminer la barrière de fission, on calcule l’énergie totale d’un noyau père le long d’une séquence de formes, qui part du noyau initial sphérique jusqu’à la formation de deux noyaux fils distants[5]. La hauteur de la barrière de fission est égale à la différence entre l’énergie maximale atteinte par le système et son énergie initiale.

La plupart des calculs sont basés sur le modèle de la goutte liquide (GL), auquel on ajoute une interaction nucléaire de proximité (NP)[6], qui intervient aux grandes déformations et quand les deux noyaux fils se séparent :

Barrières de fission estimées[7] dans un modèle de goutte liquide nucléaire
Noyau père A=32, Z=16 A=56, Z=28 A=180, Z=80 A=220, Z= 92 A = 248, Z=100
Noyaux fils 16O + 16O 28Si + 28Si 90Zr + 90Zr 110Pd + 110Pd 124Sn + 124Sn
Barrière de fission 10 MeV 29 MeV 10 MeV 5 MeV 0

Les barrières de fission passent par un maximum pour les noyaux de masse 50-60, qui sont donc très stables ; les noyaux deviennent instables vis-à-vis de la fission lorsque le produit des charges (Z1Z2) dépasse 2 000.

Barrière de fusion

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Séquence de formes utilisée pour modéliser la fusion de deux noyaux.

En raison de leur portée (même faible), les forces nucléaires agissent avant le contact des deux noyaux ; le maximum de la barrière de fusion est localisé à une distance entre les deux noyaux plus grande que la somme de leurs rayons respectifs.

La barrière de fusion entre deux noyaux peut donc être estimée par l’énergie électrostatique lorsque leurs surfaces géométriques sont distantes de 1,5 femtomètres :

Barrières de fusion estimées[7]
Système 16O + 16O 28Si + 28Si 58Ni + 58Ni 90Zr + 90Zr 124Sn + 124Sn
Barrière de fusion 10 MeV 27 MeV 89 MeV 202 MeV 226 MeV

La barrière de fusion augmente continûment avec la masse et la charge des noyaux en interaction.

Franchissement des barrières coulombiennes

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Fission spontanée

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Lorsque la barrière de fission est positive, un noyau ne peut fissionner spontanément que par un effet purement quantique, l’effet tunnel[8]. La probabilité de fission dépend de manière très sensible de la hauteur de la barrière et de sa largeur.

Pour les noyaux légers : la radioactivité alpha est le processus dominant, que l’on peut considérer comme une fission asymétrique avec émission d’un noyau d'hélium 4. Pour les noyaux lourds, la fission en deux noyaux fils dont les charges sont distribuées statistiquement autour de la moitié de la charge du noyau père est favorisée.

Fission induite

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Lorsqu’un noyau n’est pas dans son état fondamental, le processus de fission peut être favorisé ; on parle de fission induite. Par exemple la fission de l’uranium dans les centrales nucléaires est induite par absorption de neutrons.

Les collisions entre noyaux dans les accélérateurs peuvent provoquer le transfert de moment angulaire entre les noyaux du faisceau et ceux de la cible. La rotation des noyaux qui en résulte, introduit dans leur énergie un terme supplémentaire, qui abaisse la barrière de fission. Avec des vitesses de rotation croissantes, le noyau se déforme, puis fissionne spontanément (voir la page « ellipsoïde »).

Seuls les neutrons, non chargés électriquement, peuvent fusionner spontanément avec un noyau. Pour que deux noyaux chargés fusionnent, il est nécessaire de leur fournir une énergie cinétique suffisante pour passer la barrière coulombienne, comme :

- dans les collisions entre noyaux provoquées dans les accélérateurs de particules ;

- dans les cœurs des étoiles, lors du processus de nucléosynthèse (fusion de noyaux légers chauffés et comprimés par la gravitation) ;

- dans les réacteurs de fusion, où la nucléosynthèse est provoquée dans une matière nucléaire chauffée et comprimée par de puissants champs magnétiques (fusion par confinement inertiel).

Dans les deux derniers cas, les températures nécessaires sont de l’ordre de plusieurs centaines de millions de degrés. En 1989, deux physiciens américains[9] ont affirmé avoir observé des phénomènes de fusion nucléaire dans des expériences d'électrolyse, c'est-à-dire aux pression et température ambiante (voire article fusion froide). Leurs résultats n'ont jamais pu être validés, mais font toujours l'objet de recherches, vu l'impact technique et économique qui en découlerait.

Articles connexes

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Références

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  1. Bernard Fernandez, De l'atome au noyau : une approche historique de la physique atomique et de la physique nucléaire, Ellipses, (ISBN 2-7298-2784-6 et 978-2-7298-2784-7, OCLC 69665126, lire en ligne), chap. 5.1 (« Le noyau, nouvelle frontière »).
  2. Christian,. Ngô, Physique nucléaire des quarks aux applications, Dunod, dl 2014, ©2014 (ISBN 978-2-10-070541-2 et 2-10-070541-5, OCLC 881576971, lire en ligne)
  3. R.W. Hasse et W.D. Myers, Geometrical Relationships of Macroscopic Nuclear Physics, Springer Berlin Heidelberg, (ISBN 978-3-642-83017-4, 3-642-83017-X et 978-3-540-17510-0, OCLC 851370471).
  4. (en) W.D. Myers et W. Swiatecki, « The nuclear droplet model for arbitrary shapes », Annals of Physics, vol. 84, nos 1-2,‎ , p. 186–210 (ISSN 0003-4916, DOI 10.1016/0003-4916(74)90299-1, lire en ligne, consulté le ).
  5. a et b (en) G.Royer et al., « Fusion and fission barrier heights and positions within the Generalized Liquid Drop Model », Nuclear Physics A, vol. 1010,‎ , p. 122-191 (ISSN 0375-9474, DOI 10.1016/j.nuclphysa.2021.122191, lire en ligne, consulté le ).
  6. (en) J. Blocki et al., « Proximity forces », Annals of Physics, vol. 105, no 2,‎ , p. 427–462 (ISSN 0003-4916, DOI 10.1016/0003-4916(77)90249-4, lire en ligne, consulté le ).
  7. a et b Pour des calculs plus précis, voir G. Royer et al..
  8. Hélène Ngô, Physique quantique : introduction avec exercices, Masson, (ISBN 2-225-82582-3 et 978-2-225-82582-8, OCLC 25063903, lire en ligne), chap. 4.4
  9. Y. Gingras, « La fusion froide échauffe les imaginations », La Recherche, no 438,‎ (lire en ligne)