Aller au contenu

Homotherium

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.

Homotherium (du grec ancien ὁμός / homos « similaire » et θηρίον / therion « bête »[1]) est un genre fossile de grands félidés de la sous-famille éteinte des Machairodontinae (ou « félins à dents de sabre ») et appartenant à la tribu des Homotherini, ayant vécu en Amérique du Nord, Afrique et Eurasie il y a entre 4 millions d'années et 17 000 ans[2].

Description

[modifier | modifier le code]
Comparaison d'un Homotherium serum et d'un Homo sapiens

Deux espèces, Homotherium latidens et Homotherium serum, mesuraient 1,1 mètre au garrot, 1,8 mètre de long et pesaient de 190 à 250 kg. Elles avaient donc en moyenne la taille d'un lion africain mâle[3],[4], H. serum possédant le plus long fémur parmi les espèces du genre[5].

Comparé à certains autres Machairodontinae, comme Smilodon ou Megantereon, Homotherium avait des canines supérieures plus courtes, mais elles étaient plates, dentelées et plus longues que celles de tous les félins actuels. Les incisives et les canines inférieures formaient un puissant dispositif de perforation et de préhension. Parmi les félidés vivants, seul le tigre (Panthera tigris) possède de si grandes incisives, qui aident à soulever et à porter des proies. Les molaires d'Homotherium étaient plutôt faibles et n'étaient pas adaptées au broyage des os. Le crâne était plus long que chez Smilodon et présentait une crête sagittale bien développée, où les muscles étaient attachés à la mandibule. Cette mâchoire avait des brides tournées vers le bas pour protéger les canines. Ses grandes canines crénelées étaient conçues pour couper plutôt que piquer.

Homotherium est caractérisé par ses longues pattes et une tête longue et fine. Il avait l'apparence générale d'un tigre actuel, mais certaines de ses caractéristiques physiques sont plutôt inhabituelles pour un gros félin. Les proportions d'Homotherium dans les membres lui donnaient une apparence semblable à celle d'une hyène. Les pattes antérieures étaient allongées, tandis que l'arrière-train était plutôt trapu, les pieds pouvant être partiellement plantigrades, ce qui obligeait le dos à s'incliner vers la courte queue. Les caractéristiques des membres postérieurs indiquent que cet animal était modérément capable de sauter. La région pelvienne, y compris les vertèbres, ressemblait à celle d'un ours, de même que la courte queue composée de 13 vertèbres, environ la moitié du nombre de vertèbres caudales chez les félins à longue queue.

Squelette d'Homotherium serum,
au Texas Memorial Museum,
Université du Texas à Austin (Austin, Texas).

L'ouverture nasale carrée exceptionnellement grande, comme celle du guépard, permettait vraisemblablement un apport en oxygène plus rapide, ce qui facilitait l'effort. Comme dans le cas du guépard, le cortex visuel du cerveau était vaste et complexe, soulignant la capacité du félin à bien voir et à fonctionner le jour plutôt que la nuit, contrairement à d'autres félins.

En se basant sur la préférence d'Homotherium pour les habitats ouverts, tels que les plaines, et les comparaisons avec les félins modernes, l'éthologiste William Allen estime qu'Homotherium aurait eu un pelage clair, comme les lions, pour mieux se camoufler[6].

Crâne fossile d'Homotherium latidens

La plupart des vestiges fossiles d'Homotherium datent du Pléistocène moyen. Une mandibule d'Homotherium latidens provenant de la mer du Nord[7] est datée de 32 000 ans[8]. Un Homotherium serum est daté de 24 700 ans[9], mais la plus récente date connue pour cette espèce est de l'ordre de 17 000 à 18 000 ans[10].

Le déclin d'Homotherium pourrait être le résultat de la concurrence d'autres genres de félins. En Amérique du Nord, les restes fossiles d'Homotherium sont moins abondants que ceux de son contemporain Smilodon.

Alimentation

[modifier | modifier le code]

Les espèces africaines d'Homotherium semblent avoir chassé des espèces du genre Deinotherium du Pléistocène, ciblant probablement les adolescents, les vieux ou les malades d'un troupeau. Ses grandes canines devaient faciliter l'abattage de grosses proies, alors que les lions modernes prennent beaucoup plus de temps que les machairodontes pour y parvenir[11].

Squelette d'Homotherium venezuelensis

La partie lombaire inclinée du dos et la puissante section vertébrale d'Homotherium suggèrent une forme semblable à celle d'un ours, de sorte qu'elle aurait permis la traction d'une lourde proie. Le risque de briser les canines, un destin subi par d'autres machairodontes tels que Machairodus et le célèbre Smilodon, avec une certaine fréquence en raison de la lutte avec une proie, semble moindre chez Homotherium.

Sur le site de la grotte de Friesenhahn, au Texas, les restes de près de 400 mammouths juvéniles ont été découverts, ainsi que de nombreux squelettes d'Homotherium comprenant des adultes, des animaux âgés et des juvéniles. Sur la base de ce site fossile, il a été suggéré que des groupes d'Homotherium se soient spécialisés dans la chasse aux jeunes mammouths et aient traîné les animaux tués dans des grottes isolées pour les manger. Les os des jeunes mammouths trouvés dans la grotte de Friesenhahn portent des marques distinctives correspondant aux incisives d'Homotherium, ce qui indique qu'ils pouvaient traiter efficacement la majeure partie de la viande sur une carcasse et extraire la chair des os, indiquant que c’était eux et non des charognards qui avaient traîné les carcasses dans les grottes, comme cela avait été suggéré par le passé. L’examen des os indique également que les carcasses de ces mammouths juvéniles ont été démembrées après avoir été tuées par ces félins avant d’être emmenées, indiquant qu'Homotherium désarticulait le cadavre pour le transporter dans un endroit sûr, et empêcher les charognards tels que Canis dirus et le lion américain de revendiquer un repas durement gagné[12],[13].

Homotherium semble avoir conservé une excellente vision nocturne, comme la plupart des félins, et chasser de nuit dans les régions arctiques, où de nombreux Homotherium ont été découverts, aurait probablement été une méthode de chasse de choix[14].

Homotherium vivait probablement à des latitudes et des altitudes plus élevées et était donc probablement bien adapté aux conditions plus froides de l'environnement du mammouth des steppes. Les griffes réduites, les membres relativement minces et le dos incliné indiquent des adaptations à la course d'endurance dans des habitats ouverts[15].

Liste des espèces

[modifier | modifier le code]
  • Homotherium latidens Owen, 1846 (espèce type)
  • Homotherium serum Cope, 1893
  • Homotherium ischyrus Merriam, 1905
  • Homotherium venezuelensis Rincón et al., 2011

Références

[modifier | modifier le code]
  1. [Fabrini 1890] (it) Emilio Fabrini, « I Machairodus (Meganthereon) del Val d'Arno superiore », Bollettino del R. Comitato Geologico d'Italia, no 21,‎ , p. 121–144, 161–177 ; esp. 176 (lire en ligne [sur biodiversitylibrary.org])
  2. [Antón 2013] (en) Mauricio Antón, Sabertooth [« Dent de sabre »], Bloomington (Indiana), Indiana University Press, (ISBN 978-0-253-01042-1)
  3. [Sorkin 2008] (en) Sorkin, « A biomechanical constraint on body mass in terrestrial mammalian predators », Lethaia, vol. 41,‎ , p. 333–347 (lire en ligne [sur researchgate.net])
  4. [Meade 1961] (en) Grayson E. Meade, « The saber-toothed cat Dinobastis serus » (partie 2 du bulletin), Bulletin of the Texas Memorial Museum, no 2,‎ , p. 25–60 (présentation en ligne, lire en ligne [PDF] sur repositories.lib.utexas.edu)
  5. Sorkin 2008, p. 334, table 1 : « Maximal body mass estimates for the lineage of terrestrial mammalian predators considered here »
  6. (en) Brian Switek, « Did Saber Cats Have Spotted and Striped Coats? », sur scientificamerican.com,
  7. [Reumer et al. 2003] (en) Jelle W.F. Reumer, Lorenzo Rook, Klaas van der Bourg, Klaas Post, Dick Mol et John de Vos, « Late Pleistocene survival of the saber-toothed cat Homotherium in northwestern Europe », Journal of Vertebrate Paleontology, no 23,‎ , p. 260–262 (lire en ligne [sur researchgate.net]). Cité dans Stuart 2014, p. 344.
  8. [Stuart 2014] (en) Anthony J. Stuart, « Late Quaternary megafaunal extinctions on the continents: A short review », Geological Journal, vol. 50, no 3,‎ (lire en ligne [sur researchgate.net]), p. 344
  9. Stuart 2014, p. 348
  10. Stuart 2014, p. 349
  11. (en) « Deinotheres for lunch? A sabertooth's tough-skinned diet », sur chasingsabretooths.wordpress.com, (consulté le )
  12. (en) « The Diet of Saber-Toothed Cats », sur nimravid.wordpress.com,
  13. Antón 2013, p. 227–228
  14. [Metcalfe 2011] (en) Jessica Z. Metcalfe, Late Pleistocene Climate and Proboscidean Paleoecology in North America: Insights from stable isotope compositions of skeletal remains (doctorat en Géologie), University of Western Ontario, coll. « Electronic Thesis and Dissertation Repository », (lire en ligne [PDF] sur ir.lib.uwo.ca)
  15. [Galobart, Turner & Antón 2005] (en) Àngel Galobart Lorente, Alan Turner et Mauricio Antón, « Co-existence of scimitar-toothed cats, lions and hominins in the European Pleistocene. Implications of the post-cranial anatomy of Homotherium latidens (Owen) for comparative palaeoecology », Quaternary Science Reviews, vol. 24, nos 10–11,‎ , p. 1287-1301 (résumé)

Bibliographie

[modifier | modifier le code]
  • [Antón et al. 2014] Mauricio Antón, Manuel J. Salesa, Àngel Galobart et Zhijie Jack Tseng, « The Plio-Pleistocene scimitar-toothed felid genus Homotherium Fabrini, 1890 (Machairodontinae, Homotherini): diversity, palaeogeography and taxonomic implications », Quaternary Science Reviews, no 96,‎ , p. 259-268 (lire en ligne [PDF] sur academia.edu)
  • [Reumer et al. 2003] Jelle W. F. Reumer, Lorenzo Rook, Klaas Van der Borg, Klaas Post, Dick Mol et John de Vos, « Late Pleistocene survival of the saber-toothed cat Homotherium in Northwestern Europe », Journal of Vertebrate Paleontology, vol. 23, no 1,‎ , p. 260–262 (lire en ligne [PDF] sur researchgate.net)

Liens externes

[modifier | modifier le code]

Sur les autres projets Wikimedia :